Le CITES, ce qui va changer le 2 janvier 2017

Bonjour à tous,

Bon, j'ai créé ce topic sur guitariste.com, et je me suis dit que ce serait une bonne idée de le recréer ici.

Beaucoup d'entre vous en ont entendu parler, le CITES a balancé une bombe en septembre dernier. En effet, la loi régissant toutes les espèces animales et végétales de la planète vient de classer les palissandre, donc la famille dite Dalbergia en annexe 2.

Qu'est ce que cela signifie?

Pour nous, luthier, il va falloir fournir de la paperasse lors de la sortie de l'instrument du territoire dans lequel on est si on vend à l'étranger, et ce même si le palissandre est pre-ban. Pour le musicien, ça veut dire qu'il faudra un passeport pour l'instrument s'il doit voyager. Ce n'est pas une question de quantité car même pour un carré de 1 mm sur 1 mm de diamètre, ça pose problème.

Jacques Carbonneaux est sur le coup, et publie énormément d'articles expliquant de façon très précise les retombées que ce durcissement de la part du CITES impliquent...

http://www.laguitare.com/guitare-lutherie-interview-de_vidal_de_teresa_paredes_madinter-avenir_des_bois_tropicaux-9010-0.html

http://www.laguitare.com/guitare-lutherie-salon_de_la_guitare_acoustique_et_archtop-conference-la_nouvelle_reglementation_cites_2017-9016-0.html

https://reverb.com/news/new-cites-regulations-for-all-rosewood-species?utm_campaign=eb4a3636e7-rn161209_content&utm_medium=email&utm_source=newsletter&utm_term=0_5889ed6702-eb4a3636e7-59275925

Voilà, si vous avez des questions, ce topic est là pour ça et au vue du nombre de luthiers que nous sommes sur le forum, et qui suivons ça de très près, je pense que l'on peut vous aider à y voir plus clair

Intervention De Franck Cherubin:

F.Cherubin a écrit:Le commerce de palissandre (hors D.nigra, le rio) sera toujours possible, aussi bien sous forme brute que sous la forme d'un objet fini. La différence c'est qu'il faudra pour en importer/exporter hors UE (pour ce qui nous concerne) un permis délivré par la CITES (dont les représentants en France sont attachés à la DREAL de chaque région).
Les Dalbergia sont passés en annexe II, seul le palissandre de Rio (Dalbergia nigra) est en annexe I, et depuis 1992. L'annexe I c'est effectivement très restrictif, c'est également en annexe I que se trouve l'ivoire par exemple.
Mais l'annexe II n'interdit pas le commerce, il le contrôle davantage.
Pour info d'autres bois sont en annexe II depuis déjà un moment, ainsi l'acajou du Honduras, pour autant on le trouve "abondamment" sur le marché, les palissandres de Madagascar y sont également depuis 2013.
La nouveauté ce coup-ci c'est qu'alors que les restrictions et contrôles s'appliquaient jusque là seulement pour les bois bruts, et ne concernait donc que les marchands et importateurs de bois, elles s'appliquent ici désormais également pour les produits finis, concernant donc également les musiciens propriétaires d'un instrument comportant du palissandre (ou du bubinga, qui fait partie du même train de mesures législatives).
En pratique pour le musicien, s'il a une guitare avec du palissandre :
S'il ne compte pas sortir de l'UE avec... pas de soucis, il n'y a rien à faire.
S'il veut sortir de l'UE et que l'instrument date d'avant 2017, pas de souci à condition de se munir de la facture prouvant l'antériorité.
Si il veut sortir de l'UE et que l'instrument date d'après janvier 2017, la facture devra être assorti d'un document prouvant l'origine légale du palissandre. C'est au fabriquant de fournir ce document mais à vrai dire, les services "compétents", la DREAL, sont largement dépassés par la question et au jour d'aujourd'hui incapables de renseigner utilement sur la démarche à suivre. M'est avis que quand il a été décidé d'ajouter les produits finis à la liste personne ne s'est demandé ce que ça allait engendrer comme complications administratives, pour les propriétaires mais aussi pour les services supposés s'en occuper...

Voilà, ça ouvre un débat intéressant et des questions que vous vous posez tous, et auquel on peut répondre.

Très bonne idée ce Topic !
Finalement pour les musiciens qui veulent voyager avec leur guitare, pas trop de soucis à prévoir...
Bon courage aux luthiers et surtout aux industriels qui vont avoir un sacré boulot administratif pour ces déclarations.

fredchen a écrit:Très bonne idée ce Topic !
Finalement pour les musiciens qui veulent voyager avec leur guitare, pas trop de soucis à prévoir...
Bon courage aux luthiers et surtout aux industriels qui vont avoir un sacré boulot administratif pour ces déclarations.

Les clients, donc les musiciens, sont de plus en plus à se poser ces questions là et c'est nous, luthiers, qui sommes les plus qualifiés pour y répondre. Donc créer ce topic me semblait être une bonne idée effectivement

Oui, Ça va être très emmerdant pour nous de dealer avec tout ça, quand on va aller faire des festivals ce sera bien la cata également

Va y en avoir des grattes en jura-érable ondé sur les tables, tu vas voir!

quentinjazz a écrit:Va y en avoir des grattes en jura-érable ondé sur les tables, tu vas voir!

Une bien belle combinaison, du moins pour les amateurs d'archtops Je ne m'en lasse pas...

Je n'ai pas d'épicéa du Jura, ni d'érable européen. J'ai loupé ma vie.

benbenbenben a écrit:Je n'ai pas d'épicéa du Jura, ni d'érable européen. J'ai loupé ma vie.

En tout cas tu as eu l'intuition de diversifier ton stock avec de belles alternatives: du t'zalam, du claro walnut...

Pour le T'Zalam, j'en ai 1 set, 7 pour le Claro Walnut (J'avais prévu le coup à l'époque oui), Acajou Africain, Sapele, quelques sets d'érable Big Leaf... mais surtout, beaucoup de palissandres en fait. C'est ce que je préfère, et ça tombe bien car c'est la même chose pour le client

Il y a encore des voies à exploiter c'est sur, mais on voit tous arriver le jour où l'ébène sera sur le CITES et là... on sera VRAIMENT dans la merde.

Ces dernières semaines j'ai investi massivement dans l'ébène africaine et indienne (touches et Billets), l'EIR (Pour les sets) et l'African Blackwood (pour les touches) car c'est selon moi les meilleures cible que je devais viser.

benbenbenben a écrit:Ces dernières semaines j'ai investi massivement dans l'ébène africaine et indienne (touches et Billets), l'EIR (Pour les sets) et l'African Blackwood (pour les touches)

Spéculateur
Just kidding, il te faut bien un stock de matière première pour sécuriser ton activité
Dans des vidéos de visite de l'usine Martin de Nazareth, j'ai entendu Dick Boak dire que le stock de bois représente environ un an de production. Ca en fait du palissandre!

Cet été au "Behind the Scenes" tour de Martin, ils annonçaient 9ans de stock... (de nouveaux entrepôts hors du site historique de Nazareth) Ils ont du surstocker pour anticiper !

Il y a encore des voies à exploiter c'est sur, mais on voit tous arriver le jour où l'ébène sera sur le CITES et là... on sera VRAIMENT dans la merde. a écrit:

Oui enfin bon, il faut aussi penser aux populations locales, souvent pauvres, qui se sont vues piller leurs beaux arbres en vue d'alimenter des produits luxueux dont il ne touche pas vraiment grand-chose.
Vos clients passeront à autre chose que le palissandre si vous leur proposez des alternatives, c'est votre savoir-faire qui doit faire la différence.

On peut aussi saluer le travail de la CITES et se réjouir que certains pensent de plus en plus à la préservation de l'environnement et pas son unique porte-feuille.
Réjouissons-nous aussi pour les populations locales.

Si on venait chez moi couper mes beaux arbres tétards pour y récupérer la loupe et faire pourrir le reste sur place, je dois dire que je serais bien content qu'il y ait des mesures de protections.

Il n'y a pas d'agressivité dans mes propos, simplement une envie de partager un point de vue différent...

Gandalf a écrit:Il n'y a pas d'agressivité dans mes propos, simplement une envie de partager un point de vue différent...

Certes, et l'intention est certainement louable, mais

- en Afrique, les populations locales ne se gênent pas pour brûler tout ce qui leur tombe sous la main, bois précieux ou non.

- au Brésil, le palissandre de rio a été longtemps utilisé comme bois d'oeuvre (planchers, charpentes ...)

- à Madagascar, le palissandre est interdit à l'exportation, sauf sous forme de meubles

etc ...

Je n'invente rien, expériences vécues.

EDIT DE L'APLG DU 10 FÉVRIER 2017:

LES DERNIERES NOUVELLES (le 10 février 2017)

Les organes CITES des pays de l’union européenne se sont réunis le 07 février 2017 pour finaliser le texte de la réglementation en vigueur en Europe. Les points à retenir sont les suivants :

1) FAQ
La Commission a fait préparer un premier document de Foire aux Questions au sujet des Dalbergia et de leur réglementation. Le document doit être légèrement amendé, suite aux discussions de ces derniers jours. Une fois finalisé, il sera ensuite disponible sur le site Europa Cites : http://ec.europa.eu/environment/index_en.htm


2) Voyage des musiciens
Un accord a été trouvé assez facilement au sujet des musiciens. Il a été acté que les musiciens – amateurs comme professionnels – se déplaçaient pour jouer et non pas pour vendre leurs instruments.
Le but non-commercial de ces voyages a donc été confirmé ; les musiciens n’auront pas besoin de demander de Certificat pour Instrument de Musique (CIM) pour leurs instruments contenant des Dalbergia ou Guibourtia.


3) Question du SAV – passage de frontière des instruments pour entretien et réparation
Un avis favorable a été émis suite à notre demande de libre circulation des instruments renvoyés aux maisons mères dans le cadre de l’application des garanties ou du suivi après vente ( donc cela inclut les réparations payantes). Ce principe de libre circulation des instruments a été retenu car comme nous l’avons mis en avant à Bruxelles, « lors de ces déplacements les instruments ne changent pas de propriétaires« .
Cependant, il s’agit actuellement d’une position européenne ! Il faudra attendre la décision des autres pays hors UE à ce sujet.
L’UE a prévu de rédiger une notification sur ce sujet et de demander à la CITES de la diffuser à l’ensemble des Etats-Parties. Les pays pourront suivre son exemple, ou non.
Il faudra donc vérifier, au cas par cas, avec le pays du musicien qui souhaite faire réparer son instrument si l’envoi de l’instrument peut se faire sans document CITES ou non.


Un projet de texte émanant de l’UE doit être rédigé et validé par les bureaux CITES des différents pays. Il sera ensuite transmis aux professionnels afin qu’ils donnent leurs avis avant sa publication officielle !!


Nos avis et problématiques commencent donc à être pris en compte par la CITES.